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À LA UNE
Publié le 04/05/2010
Ma ville, ma famille

 

Interviewé : Chai Peigen

Ville de naissance : Bengbu, province de l'Anhui

Ville de résidence : Beijing

Villes chinoises visitées : la plupart des moyennes et grandes villes

Villes étrangères visitées : New York, Paris, Londres, Tokyo...

 

Pour moi, une bonne ville, c'est : caractère local, liberté et diversité, l'identité et l'attitude culturelle des habitants

 

Témoignage :

 

Quelle est la meilleure ville à mes yeux ? La réponse dépend de mon statut. Si je suis un touriste, je choisirais peut-être une ville pittoresque et riche en patrimoine culturel. Mais en tant qu'habitant, je vous dirais sûrement Beijing. Car c'est dans celle ville que je vis et travaille. Ma famille est ici.

 

Mon expérience est peu ordinaire. A cause de leur travail, mes parents ont dû déménager souvent. Et depuis mon plus jeune âge, je les ai suivis partout. A Zaozhuang au Shandong, j'ai vécu dix ans, et à Zibo, dans la même province, huit ans. J'ai fait mes études universitaires dans l'Anhui. Puis, je suis allé à Tianjin pour faire mon master pendant trois ans. Après, j'ai commencé ma carrière à Beijing, et c'est là que je me suis enfin installé définitivement. Treize ans se sont alors écoulés. Ainsi, j'ai du mal à parler de « ville natale ». Au contraire, je vois Beijing comme ma propre ville, celle qui a enregistré mes expériences. Donc, le choix de Beijing est émotionnel, et ne peut donc être mesuré rationnellement. Par exemple, je voyage souvent dans les grandes villes européennes. Elles sont peut-être plus modernes et confortables que Beijing, mais au bout d'une semaine, ma famille commence à me manquer. Et où est ma famille ? Á Beijng ! A chaque fois que j'atterris à l'Aéroport de la Capitale, je me dépêche de reprendre la route vers le centre ville.

 

Bien entendu, quand je dis Beijing, c'est large. Chaque Pékinois nourrit un sentiment différent à l'égard de cette ville. Mon espace de vie et d'activités se borne arrondissements de Xicheng et de Haidian. Dans une certaine mesure, il se résume au trajet entre ma maison et mon bureau. Et il arrive que pendant les deux tiers de l'année je ne sorte pas de cette zone.

 

J'aime le sport. S'il y a un match à Shanghai, je prends l'avion illico. Mais je n'ai jamais assisté à un match à Beijing. Pourquoi ? Parce que ces matchs organisés à Beijing sont trop proches de moi. Je n'ai pas besoin de parcourir une longue distance. Je sais que si je veux m'y rendre, je le peux. Et cela me donne une certaine satisfaction. En fin de compte, pour moi, Beijing est devenue une notion, la notion de « famille ».

 

En effet, l'estime que l'on porte à une ville est personnelle, et même émotionnelle. Ce sont l'expérience et le désir qui nourrissent le jugement de chacun. Les besoins diffèrent, le jugement change. Prenons l'exemple de Beijing, si un riche la considère comme le paradis des désirs, un salarié lambda pourrait la trouver dure, à cause des bouchons dans les transports tous les matins et tous les soirs, et du prix des logements, qui avoisine les dix mille yuans le mètre carré. Ainsi, il est hasardeux de définir une ville selon un jugement personnel.

 

Si on met à côté ces jugements subjectifs et qu'on réfléchit du point de vue du développement durable, à quels critères la « meilleure ville » doit-t-elle répondre ? En tant qu'architecte, je voyage souvent, aussi bien en Chine qu'à l'étranger. En m'inspirant de l'histoire et de la culture de toutes ces villes, je crois avoir trouvé la réponse.

 

C'est tout d'abord sa particularité qui rend une ville vivante. Les villes comme Chengdu, Hangzhou et Guangzhou ont bien conservé leurs caractéristiques locales et est facile d'être identifiée parmi de nombreuses villes chinoises. Ce que nous ne souhaitons pas voir, ce sont des petites et moyennes villes qui se développent selon le même cahier des charges, pour devenir des zones industrielles sans identité. Ce serait le plus grand malheur d'une ville.

 

Deuxièmement, l'homme est l'élément le plus important d'une ville. Un des principaux critères de la meilleure ville doit être l'harmonie entre les différents groupes d'habitants. Je suis resté une semaine à New York. Ce qui m'a plus impressionné là-bas, c'est que les Newyorkais, de différentes couleurs de peau et issus de diverses cultures, partagent une seule et même ville, tout en conservant leurs propres coutumes dans chaque quartier. Et quand ces diverses cultures se rencontrent, le charme de la ville se dégage.

 

Enfin, je souhaite souligner l'importance de l'attitude des habitants à l'égard de la culture. Il y a peu, l'Assemblée populaire municipale de Beijing a proposé de transformer la capitale en une « ville mondiale » comme Londres et Paris. Alors, je me suis demandé en quoi résidaient l'influence et la vivacité de ces villes ? S'agit-il simplement du British Museum, de la Tate Modern, du Musée du Louvre et du Centre Pompidou ? Non. C'est plutôt l'attitude de la ville à l'égard de la culture traditionnelle et de l'art moderne qui attire le monde entier. Les installations culturelles n'en sont que les supports. A Beijing, ce n'est pas parce qu'il y a la Grande Muraille et la Cité interdite que la ville est influente. Comment les Pékinois considèrent-ils leur patrimoine historique ? C'est dans la réponse à cette question que réside la clé de la meilleure ville. Avant tout, bien que Beijing soit en croissance rapide, il ne faut pas se précipiter. Lorsqu'ils se soucient du logement, des actions boursières et des revenus, les habitants doivent également réfléchir aux caractéristiques culturelles de leur ville. Il faut peut-être encore du temps pour que les Chinois en prennent conscience.

 

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