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Publié le 18/01/2010
Le ciel européen s'assombrit

L'Union européenne perd son leadership dans les négociations sur le changement climatique

 

Wang Ruibin

, directeur adjoint du Département d'information et d'analyse des risques de l'Institut d'Etudes internationales chinois

L'influence de l'Union européenne dans la lutte globale contre le changement climatique a été mise à mal lors du Sommet de Copenhague. Au regard des négociations menées au Danemark le mois dernier, on peut dire que l'influence de l'UE a perdu de sa superbe.

Depuis la Conférence de Bali sur le changement climatique en 2007, l'UE s'est démenée pour réaffirmer le rôle de leader qu'elle s'était assurée depuis l'adoption du Protocole  de Kyoto il y a dix ans.

Mais les failles inhérentes à ses actions depuis ont sérieusement terni son image. En effet, ajoutées aux objectifs de réduction des émissions et à une réticence à l'action, les pays membres de l'UE y ont perdu plus qu'escompté.

En 2007 notamment, l'UE a annoncé une réduction de ses émissions de gaz à effet de serre de 20 à 30% par rapport aux niveaux de 1990 avant 2020.

Cependant, cela pose problème : plus encore, afin de contenir la hausse globale des températures sous la barre des 2°C, les objectifs de l'UE doivent, en fait, être révisés à 40% au moins. Entre-temps, d'autres pays, comme le Japon et la Norvège, ont déjà dépassé l'UE en termes de réduction de leurs émissions.

Schématiquement, l'Union s'est mise à dos la communauté mondiale en adoptant une stratégie "Je le ferai si vous le faites", afin d'honorer ses propres engagements. En conséquence, les Etats-Unis, la Chine, l'Inde et le Brésil ont réduit leurs propres objectifs plutôt que de suivre le modèle européen.

L'Union européenne n'a par ailleurs pas su édifier un système de réduction des émissions satisfaisant. Ces dernières années, le système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre a été mis en place – considéré comme un pilier de la politique européenne sur le changement climatique – comme un prototype pour le futur marché global des émissions. Néanmoins, depuis son lancement en 2005, le système s'est révélé peu efficace, au regard des prix bas du carbone, et des deux principaux effondrements des prix.  

Durant les deux jours qui suivirent l'ouverture de la Conférence de Copenhague, le prix de la tonne de carbone a grimpé de 8,7%.

De plus, les récents appels de l'UE pour la mise en place d'une indemnité carbone pour les compagnies aériennes ont provoqué un tollé. En réalité, la plupart des réductions réalisées par l'UE sont imputables au déclin de la production industrielle et à la récession en Europe de l'Est.  

Et pour compléter le tableau, l'UE s'appuie sur des mécanismes d'achat compensatoires de carbone à l'étranger, en lieu et place de la mise en application de standards de réduction de CO2.

Par ailleurs, notons que l'Europe échoue à apporter une assistance adéquate aux pays les plus exposés aux conséquences du changement climatique. Lors d'une session du Sommet de Copenhague, par exemple, les pays membres de l'UE organisaient une réunion à Bruxellesafin d'aider les pays en développement à  combattre le réchauffement climatique.  Les dirigeants européens ont décidé d'offrir une enveloppe de 10 milliards de dollars pendant les trois années à venir. Sans surprise, un montant bien moins élevé que ce que les pays pauvres africains espéraient.

Par ailleurs, les dirigeants de l'UE n'ont pas mentionné la composition de ce fond, et encore moins sa répartition entre les différents Etats membres.  

Aujourd'hui, seuls 17 pays européens ont promis une contribution, la Pologne et d'autres pays de l'Est ayant refusé, prétextant des difficultés économiques et un haut taux de chômage.  

Dans l'Accord de Copenhague, l'Europe a promis de lancer un Fond vert du climat, avec d'autres pays industrialisés, prévoyant une levée de 100 milliards de dollars par an à l'horizon 2020 pour répondre aux besoins des pays en développement. Mais cet Accord n'ayant aucune valeur juridique, la promesse ne demeure qu'orale.  

Les conflits d'intérêt entre les trois acteurs majeurs des négociations sur le climat –Union européenne, Etats-Unis et pays en développement – ont également érodé l'influence de l'UE.

Depuis l'investiture du président américain Barack Obama en janvier dernier, les Etats-Unis cherchent à dominer les négociations internationales sur le changement climatique.

L'administration Obama, voit dans le processus de Copenhague une opportunité pour prendre l'ascendant sur son partenaire européen.

A bien des égards, la manœuvre a réussi. Alors que Washington s'efforce de promouvoir les nouvelles énergies et le marché américain des émissions entre les nations industrialisées et les pays en voie de développement comme l'Inde ou la Chine, l'Union européenne apparaît encore plus marginalisée.

Quoiqu'il en soit, les Etats-Unis ne font pas la différence dans les négociations internationales sur le climat, en raison de l'impasse législative dans laquelle le pays se trouve, et de l'énorme pression de groupes d'intérêt nationaux.

L'embarrassante posture américaine a entaché la collaboration entre Washington et Bruxelles. Les deux parties sont embourbées dans des disputes récurrentes, empêchant l'avènement d'un consensus sur la date d'arrêt des émissions.

Déjà en désaccord avec les Etats-Unis, l'Europe n'a pas non plus obtenu le soutien des pays en voie de développement. Pire, elle a même tenté d'abandonner complètement le Protocole de Kyoto, tout en passant outre le principe des "responsabilités communes mais différenciées" défini par le protocole.

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