Levons le voile sur la mission de la Marine chinoise |
Le 24 décembre 2008, les plages de la baie de Sanya (province de Hainan), foisonnaient de tourtereaux des quatre coins du monde attirés par la clémence du climat local. A l'autre pointe de la baie, un tout autre spectacle se préparait : les navires de guerre d'une base de destroyer convergeaient lentement vers le même point, un millier de soldats de la Marine nationale attendaient avec impatience leur prochain embarquement. Au delà de ces allées et venues, un flux impressionnant de fruits et légumes en grande quantité s'opérait, il s'agissait des derniers préparatifs avant le départ. Deux jours plus tard, la Marine chinoise partit de cette célèbre destination touristique pour rallier sa prochaine destination : les périlleuses côtes somaliennes. C'était une occasion en tout point historique : la première expédition historique de la Marine chinoise hors de ses propres rivages et la réalisation d'une mission de prime importance hors du Pacifique. Près de six siècles plus tôt, lors du règne des Ming (1368-1644), Zheng He était parvenu à rallier neuf ports du territoire somalien, à la recherche d'épices telles que l'arbre à encens (Boswellia carteri) ou l'ambre gris (Ambra grisea), et d'animaux exotiques. Désormais cet endroit-là est davantage sous le feu de l'actualité pour être devenu le repaire de pirates se livrant à toutes sortes d'exactions sur les navires longeant les côtés de ce territoire. Une expédition qui a pris tout le monde de court En fait, les fluctuations ont été nombreuses avant la prise de décision de la mobilisation de la flotte chinoise. Selon le porte-parole du Ministère des Affaires étrangères Liu Jianchao, la Chine possède actuellement la quatrième flotte commerciale au monde. De janvier à novembre 2008, ce fut au total 1 265 bateaux commerciaux qui transitèrent par la zone maritime de Somalie, dont presque un cinquième ont subi les foudres des pirates. Bien que de plus en plus de voix dans l'opinion publique s'élevaient pour que la Marine chinoise frappe fort contre les pirates, le gouvernement chinois restait muré dans son silence jusqu'au 16 décembre. La Chine semblait faire très peu de cas de la participation aux activités militaires de riposte contre les pirates somaliens. En outre, elle était la dernière des membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU à ne pas encore avoir déployé de flotte sur les côtes somaliennes. Ainsi l'ambassadeur somalien accrédité en Chine avait sans détour fait état du très bon accueil qui serait réservé aux forces navales chinoises dans les zones maritimes de Somalie. Une vive discussion s'engagea quant à la légitimité de l'expédition, tandis que chez certains esprits s'esquissaient les propos absurdes de « menace chinoise ». Nombre d'experts de la défense nationale et de diplomates chinois discutaient de la possibilité de mettre en place une expédition que le pays n'avait pas connue depuis le XVe siècle. Récemment, le Journal de la Marine de l'Armée populaire de Libération publia plusieurs articles, évoquant la légitimité de l'attaque de la Marine chinoise contre les pirates somaliens. Selon ce journal, la sécurité de la communication maritime revêt d'une signification stratégique considérable pour la Chine ; dans le cadre du droit international public, il existe un consensus international qui prévaut : les grands pays responsables doivent mettre en place des initiatives militaires visant à protéger la sécurité du commerce et du transport international. Cette position du côté militaire laisse entendre un revirement de la politique militaire du pays. Le 16 décembre, le Conseil de Sécurité de l'ONU a approuvé à l'unanimité une résolution autorisant l'emploi des forces maritimes, continentales ou aériennes contre les pirates somaliens. Peu de temps après, le ministre adjoint aux Affaires étrangères He Yafei a fait connaître la position officielle de la Chine : « La Chine envisage l'envoi d'une flotte au large de la Somalie pour des opérations d'escorte. » |