« La visite du président français Emmanuel Macron en Chine après trois années d’interruption à cause de la pandémie est très importante parce que c’est beaucoup mieux de se parler en direct… Le président Macron et le président Xi auront plusieurs heures de discussion non seulement jeudi à Beijing, mais aussi vendredi à Guangzhou. Cette visite marque le retour des échanges humains directs entre la France et la Chine, et cela permet de reprendre les échanges commerciaux, universitaires, artistiques, entre autres, qui sont très importants dans la substance de la relation sino-française. L’accompagnement de la présidente de la Commission européenne montre qu’il y a là une démarche qui n’est pas simplement française, mais aussi plus largement européenne », a déclaré Justin Vaïsse, fondateur et directeur général du Forum de Paris sur la Paix, qui a dirigé le Centre d’analyse, de prévision et de stratégie (CAPS) au ministère français des Affaires étrangères entre 2013 et 2019, à La Chine au présent.

M. Vaïsse estime que cette visite a d’autant plus de poids que les deux dirigeants se parleront non seulement sur des sujets de coopération, mais aussi sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine. Selon M. Vaïsse, les principes proposés par la Chine dans la Position de la Chine sur le règlement politique de la crise ukrainienne en février font l’objet d’une attention particulière. En tant que forces significatives pour le maintien de la paix, la Chine et la France partagent de nombreux points de vue, notamment sur le maintien de l’intégrité territoriale, le non-emploi des armes nucléaires et la protection des civils.

Selon M. Vaïsse, le président Macron va également demander le soutien de la Chine sur la réforme du système financier international au cours de sa visite. « Le système financier international ne marche plus très bien, c’est-à-dire que les institutions qui ont été mises en place à Bretton-Woods après la Seconde Guerre mondiale – la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, etc. On voit bien qu’il y a une crise de liquidité pour les pays en développement, qui ont beaucoup de mal à se financer et des problèmes de dette très importants. Le président Macron convoquera le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial les 22 et 23 juin, et ce sommet nécessite le soutien de la Chine parce que la Chine est devenue importante dans ces questions, en particulier celle de la dette de ces pays en développement », a précisé M. Vaïsse. Il a ajouté que ce sommet vise à atteindre deux objectifs. Tout d’abord fournir des liquidités aux pays en développement qui en manquent et sont en crise, et rendre possible leur transition climatique, c’est-à-dire les aider à répondre aux catastrophes climatiques quand il y en a des inondations, des sécheresses, des cyclones. Ensuite, les aider à effectuer leur transition pour émettre moins de CO2, et cela doit accompagner le développement qui reste la première des priorités.

Selon M. Vaïsse, outre les domaines de coopération traditionnels tels que l’énergie nucléaire et le changement climatique, les deux pays peuvent renforcer leur coopération dans la technologie et la gouvernance globale. « Il y a beaucoup de coopérations possibles qui peuvent aussi se renforcer dans les années à venir, et qui peuvent à terme servir les deux pays et l’Europe plus généralement », a-t-il remarqué.

M. Vaïsse estime que le Forum de Paris sur la Paix joue un rôle très précieux dans le renforcement de la coopération sino-française et sino-européenne en rassemblant non seulement le nord et le sud, mais aussi l’est et l’ouest. « Le forum fait travailler différentes catégories d’acteurs – des entreprises, des États, des organisations de la société civile et des banques de développement – autour des sujets communs tels que les minéraux critiques, les questions spatiales et le changement climatique. Sur tous ces domaines, le forum est très actif, et comporte des acteurs chinois de premier plan », a-t-il conclu.