Au Mozambique, une jeune militante se bat en faveur d’une prise de conscience écologique.

Un samedi tôt le matin, un groupe de 18 jeunes brave les prévisions météo pour parcourir les deux kilomètres séparant la zone résidentielle de Matola de la forêt de mangroves de l’océan Indien qui baigne Maputo, capitale du Mozambique. Équipés de sacs-poubelle et de gants jaunes, leurs intentions ne sont pas difficiles à cerner.

Vêtue comme les autres membres du groupe d’un T-shirt blanc portant le slogan « Geração Consciente » (« Génération consciente » en portugais), Regina Charumar ouvre la marche. La jeune femme est la présidente et la fondatrice de l’organisation qui, depuis plus de trois ans, sensibilise les habitants de Maputo à l’écologie.

Geração Consciente est une initiative portée notamment par des jeunes, ayant pour mission d’organiser régulièrement des campagnes de sensibilisation aux questions écologiques (programme télévisé du même nom, opérations de nettoyage, interventions dans les universités, etc.).

Militante écologiste

Regina Charumar milite pour la justice environnementale au Mozambique. (COURTOISIE)

Après avoir atteint leur destination, les jeunes membres de Geração Consciente se divisent en duos et commencent immédiatement à ramasser les déchets plastiques qui polluent la mangrove de Lingamo. Ce superbe site naturel offre à ses visiteurs une vue imprenable sur Maputo, d’où l’on peut admirer le pont Katembe et les magnifiques flamants roses qui viennent se nourrir dans ses bassins naturels. Sans les innombrables déchets déversés sur le site par les cours d’eau en provenance de la ville, l’endroit serait un véritable paradis.

Étudiante en doctorat en développement social, mention environnement, Regina Charumar, 32 ans, est une ardente défenseuse de l’environnement. L’initiative Geração Consciente est le fruit de cet engagement militant. La jeune responsable est née dans la ville de Beira, deuxième plus grande ville du Mozambique, connue depuis 2019 après avoir été dévastée par le cyclone Idai, qui avait causé plus de 750 morts.

« Je milite activement en faveur de la cause environnementale. J’essaie d’intégrer mon engagement dans tous mes projets professionnels, que ce soit en tant qu’enseignante ou présentatrice de télévision », affirme Mme Charumar.

Lors de son arrivée à Maputo il y a sept ans, la jeune femme s’était dite scandalisée par l’état des plages, en particulier celui de la célèbre plage de la Costa do Sol. En partenariat avec la communauté universitaire de la ville, elle a lancé l’opération Caco en 2015, projet qui a permis de transformer la plage la plus sale du Mozambique en l’une des mieux entretenues.

Son penchant pour l’organisation est une des raisons qui l’ont poussée à adopter une démarche écologique. Coïncidence ou pas, son nom de famille, Charumar, est un dérivé du mot portugais arrumar, qui signifie « nettoyer » ou « organiser ». « Je suis persuadée que mon nom de famille me renvoie à la nécessité de protéger l’environnement. Quand j’étais petite, j’aimais beaucoup jardiner et j’avais mon propre potager », raconte-t-elle.

Elle a également fondé la coopérative Ntumbuluku (« origine » dans un dialecte du sud du Mozambique) dans le but de sensibiliser la population mozambicaine en matière d’environnement, ainsi que le groupe Friends of the Environment. En 2018, Mme Charumar a participé à la cérémonie des Southern Africa Startup Awards en tant qu’ambassadrice pour l’environnement.

Geração Consciente est bien plus qu’une simple association. Ses membres font preuve de beaucoup de respect pour sa jeune présidente, dont ils admirent l’engagement, et considèrent l’organisation comme une famille à laquelle ils sont profondément attachés.

Tarik Azizi a rejoint l’association il y a deux ans après avoir été bénévole au sein de plusieurs organisations écologistes. Le jeune homme a tout de suite adhéré aux méthodes de travail de Geração Consciente, et en particulier au fait que le projet ne se limite pas à des actions de nettoyage. Il apprécie en effet les campagnes de sensibilisation à la protection de l’environnement.

« Nos liens vont au-delà des activités de l’association. Quand nous nous retrouvons, comme aujourd’hui, notre objectif n’est pas seulement de nettoyer, mais aussi de profiter de la compagnie des autres membres. Nous sommes heureux d’agir ensemble. » Geração Consciente est la preuve qu’une initiative individuelle peut provoquer un changement de mentalité collectif en matière d’écologie.

Justice environnementale

Geração Consciente est une initiative qui donne la priorité à l’environnement du Mozambique. (COURTOISIE)

Mme Charumar estime que le gouvernement du Mozambique ne s’engage pas assez en faveur de la protection de l’environnement. Malgré ses faibles émissions de CO2, c’est l’un des cinq pays les plus touchés par le changement climatique au monde du fait de sa géographie : son littoral s’étend sur 2 700 km et près de la moitié du pays est constituée de zones de faible altitude, ce qui le rend particulièrement vulnérable à la hausse du niveau des océans.

Mais cette longue zone côtière constitue également un atout pour le pays, avec des plages qui font du tourisme l’une des plus grandes ressources économiques du Mozambique. De plus, en 2010, une quantité considérable de gaz naturel a été découverte au sud du pays, qui place le Mozambique à la 13e place des pays avec les plus grandes réserves de gaz naturel au monde.

« Notre pays est d’une richesse incomparable en termes de ressources naturelles, de faune, et de biodiversité. Il est indispensable que le gouvernement s’empare des questions environnementales. Nous ne pourrons protéger et préserver nos ressources que si nous commençons à considérer l’environnement comme une priorité », souligne-t-elle.

Travaillant au sein de plusieurs établissements d’enseignement supérieur, dont l’Instituto Superior de Comunicação e Imagem, Mme Charumar remarque qu’il faudrait inclure les questions environnementales dans les programmes scolaires. Des campagnes de sensibilisation à l’écologie seraient également nécessaires dans les médias selon elle, car « le Mozambique possède la meilleure législation en matière d’environnement en Afrique ».

« En mettant à jour notre législation et en l’appliquant scrupuleusement, notre pays pourrait être le meilleur au monde sur le plan de la protection de l’environnement », conclut-elle avec optimisme. Cette conviction la motive à continuer à se battre pour la justice environnementale au Mozambique.

Sur son compte Instagram, Mme Charumar se nomme « Ambientalist », autrement dit militante soucieuse de la qualité de l’environnement, en particulier concernant le contrôle de la pollution. Elle a choisi d’axer ses campagnes de sensibilisation sur les jeunes, car elle est convaincue qu’ils représentent le futur de la justice environnementale au Mozambique.

Reportage du Mozambique

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