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Ukraine : progrès dans la transition |
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Zhang Hong · 2016-02-26 · Source: Beijing Information | |
Mots-clés: Ukraine; monde |
Deux années après le début de la crise en Ukraine, des progrès significatifs ont été accomplis dans l'élaboration d'une solution politique. L'optimisme est donc de mise, surtout si l'Ukraine peut tirer parti des possibles améliorations dans les relations entre la Russie et l'Occident et de la reprise modeste de l'économie internationale.
Deux ans ont passé depuis le début de la crise en Ukraine, avec des conflits incessants qui ont failli conduire ce pays européen au bord du gouffre. En 2015 cependant, la situation n'a pas été incontrôlable en Ukraine comme certains l'avaient affirmé. Malgré d'innombrables difficultés, le pays est parvenu à assurer une stabilité politique relative, à éviter la débâcle économique et a même réussi à maintenir la trêve dans sa partie orientale.
Le processus de réforme politique avance
Depuis l'éviction de Viktor Ianoukovytch de la présidence en février 2014, la situation politique en Ukraine a été souvent décrite comme « chaotique » et « extrême ». Un changement s'est cependant produit en 2015. Le président Petro Poroshenko et le gouvernement sont parvenus à contrôler les événements et à lutter contre les intrusions politiques des oligarques, un fléau qui touche le pays depuis son indépendance en 1991 après l'éclatement du bloc soviétique.
En 2015, sous la pression du Fonds monétaire international (FMI) et de l'Union européenne, le gouvernement ukrainien a pris des mesures pour que l'emprise des oligarques sur l'économie se desserre, mais la résistance aura été vive. En mars 2015, la milice privée de l'un d'entre eux, Ihor Kolomoisky, a en effet occupé les bureaux de deux sociétés étatiques du secteur énergétique à Kiev après une initiative du Parlement de lui en retirer le contrôle. Les pressions de la population et des pays occidentaux ont néanmoins contraint M. Kolomoisky de démissionner de son poste de gouverneur de l'oblast de Dnipropetrovsk après une semaine de confrontation. Peu après cet incident, le gouvernement a annulé de nombreuses mesures fiscales préférentielles pour les sociétés contrôlées par les oligarques.
Le gouvernement central apparaissant comme faible dans la crise politique après février 2014, les organisations ultra–nationalistes ont commencé à gagner du terrain en Ukraine. Certains partis ultra–nationalistes ont remporté des sièges lors des élections parlementaires d'octobre 2014 et exercé une plus grande influence politique, entravant les tentatives de réconciliation nationale du président Poroshenko et du gouvernement. En 2015 cependant, l'influence de ces partis a commencé à décliner. Lors des élections locales d'octobre 2015, les partis de centre–droit, modérés, ont obtenu un large soutien car un nombre croissant d'électeurs ont commencé à réaliser qu'une résolution rationnelle et pacifique du conflit dans l'est de l'Ukraine constituait le choix le plus judicieux et qu'une autonomie accrue de la région pouvait servir de base à une réconciliation politique définitive. Entretemps, l'Ukraine a nommé des ressortissants étrangers à certains postes de la haute fonction publique et promu de nombreux jeunes fonctionnaires éduqués en Occident afin d'amplifier les effets de sa réforme politique.
La reprise économique est au coin de la rue
En raison de la morosité de l'économie mondiale, notamment avec la forte baisse du prix des matières premières sur les marchés internationaux, le PIB de l'Ukraine s'est contracté de 10 % en 2015. Grâce aux prêts internationaux opportuns et à l'aide de l'Union européenne, après la mise en œuvre ferme de mesures dans les domaines de la finance et de l'énergie demandées par le FMI et la Banque mondiale, le pays a pu échapper à l'effondrement de son économie et afficher un excédent – minime – de la balance des paiements dans un contexte inflationniste grave et une baisse des échanges internationaux. L'Ukraine a aussi signé des accords avec ses principaux créditeurs pour restructurer sa dette extérieure considérable l'an passé, évitant la faillite pour non–paiement de sa dette souterraine.
L'économie ukrainienne repose en grande partie sur les exportations de produits métallurgiques, chimiques et agricoles. La chute de ces exportations pourra être enrayée. Après l'entrée en vigueur de la Zone de libre–échange complet et approfondi entre l'Ukraine et l'Union européenne le 1er janvier, l'Union européenne va en effet supprimer ses droits de douane et les autres barrières sur ses importations de l'Ukraine, ce qui facilitera la reprise économique du pays. Une autre bonne nouvelle pour l'économie ukrainienne, c'est que la consommation d'acier de l'Union européenne devrait repartir en 2016.
Par ailleurs, la Russie est un partenaire commercial traditionnel de l'Ukraine. Les tensions entre les deux pays ont cependant entraîné une réduction significative des échanges bilatéraux. Des statistiques pour 2015 montrent que la part de la Russie dans les importations et les exportations de l'Ukraine est passée de 30 % par le passé à seulement 15 %. Le pays a aussi réduit sa dépendance énergétique à l'égard de la Russie.
A l'avenir, les facteurs négatifs qui affectent l'économie ukrainienne vont progressivement s'estomper et les facteurs positifs, comme l'intégration plus prononcée dans l'Union européenne et la globalisation vont jouer un rôle plus important. L'économie ukrainienne devrait rebondir avec la lente reprise de l'économie mondiale.
La situation sécuritaire s'améliore
Depuis la signature de nouvel Accord de Minsk pour trouver une solution au conflit à l'est de l'Ukraine en février 2015, un cessez–le–feu a été mis en œuvre dans la région. Même si des échauffourées se produisent parfois, la situation sécuritaire s'est considérablement améliorée. Après deux années de combats, l'armée régulière et les insurgés pro–indépendance de l'est de l'Ukraine ne souhaitent pas subir des pertes plus importantes. Les deux parties sont conscientes qu'elles ne peuvent pas obtenir une victoire décisive sur le champ de bataille. Le long conflit a non seulement entraîné de grandes souffrances, mais il a aussi fait obstacle à la reprise économique.
Dans le même temps, l'escalade de la crise syrienne et l'émergence rapide du groupe extrémiste de l'Etat islamique au Moyen–Orient ont ouvert une fenêtre d'opportunité pour le réchauffement des relations entre la Russie et l'Occident, qui sont derrière les deux parties en conflit en Ukraine. La glace s'est brisée après le début de la crise des réfugiés en Europe et les attaques terroristes de Paris l'an passé. Les deux parties ont non seulement tenté de trouver un terrain d'entente dans la lutte contre le terrorisme, mais déploient aussi des efforts pour accroître le dialogue dans la crise ukrainienne. Ainsi, de plus en plus de voix dans l'Union européenne s'élèvent pour appeler à une amélioration des relations avec la Russie. La France a clairement fait savoir qu'elle essaiera de pousser l'Union européenne à lever les sanctions qui frappent la Russie d'ici à cet été. Les Etats–Unis et l'Union européenne ont aussi accru les pressions politiques sur le gouvernement ukrainien, l'appelant à reprendre le processus de révision constitutionnelle, actuellement interrompu, et ainsi poser les fondations légales pour le règlement définitif du conflit dans l'est de l'Ukraine.
Quand le secrétaire d'Etat américain John Kerry s'est rendu à Moscou en décembre dernier, il a déclaré que lorsque le nouvel Accord de Minsk entrera en vigueur, l'Occident lèverait ses sanctions à l'encontre de la Russie et rétablirait ses relations avec Moscou. Peu après sa visite, le président russe Vladimir Poutine a nommé Boris Gryzlov, membre du Conseil de sécurité de Russie, représentant russe du Groupe de contact établi en juin 2014 pour mettre en œuvre le plan de paix annoncé par le président Poroshenko. Le plan de paix a échoué mais le Groupe de contact a continué de fonctionner pour accueillir les réunions entre le gouvernement ukrainien et les insurgés en faveur de l'indépendance dans l'est de l'Ukraine. Dans une interview avec le journal russe Kommersant le 17 janvier, M. Gryzlov s'est dit optimiste quant à la mise en œuvre du nouvel Accord de Minsk.
En résumé, certains signaux positifs dans la question ukrainienne apportent de nouveaux espoirs pour un règlement politique. Si l'Ukraine peut effectivement réduire les tendances nationalistes et tirer parti de l'amélioration de la situation internationale pour promouvoir la réconciliation nationale, la crise pourrait bientôt être résolue.
(L'auteur est chercheur adjoint à l'Institut des études russes, d'Europe orientale et d'Asie centrale de l'Académie des sciences sociales de Chine)
Beijing Information