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Avec ou sans Poutine, la Russie sera toujours inflexible |
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Zuo Fengrong | ||
Mots-clés: Russie; inflexible; monde |
Malgré les sanctions et les difficultés économiques, la Russie maintient une politique étrangère inflexible en étant présente sur de nombreux fronts diplomatiques. Elle répond ainsi aux souhaits de sa population et préserve ses intérêts fondamentaux dans sa périphérie. Un commentaire de Zuo Fengrong, professeur à l'Institut d'études de la stratégie internationale relevant de l'Ecole centrale du Parti.
Face aux assauts conjoints lancés par des pays occidentaux comme les Etats-Unis, le premier ministre russe Dmitri Medvedev a averti que le monde risquait de glisser dans une « nouvelle Guerre froide » lors de la conférence sur la sécurité de Munich, faisant éprouver une nouvelle fois l'inflexibilité de la Russie. Depuis 2014, Moscou poursuit une diplomatie dure, en contrôlant de nouveau la Crimée, en répondant aux sanctions occidentales par des sanctions et en s'attaquant à l'Etat islamique en Syrie. Certes, cette dureté n'est pas étrangère au style personnel du président Vladimir Poutine, mais elle est principalement liée à l'environnement géopolitique, à la tradition historique et culturelle, ainsi qu'aux spécificités de la nation russe.
Cette inflexibilité de la Russie est à mettre sur le compte du grignotement de son espace stratégique par l'Occident. Après la fin de la Guerre froide, Moscou avait tenté un temps d'embrasser l'Occident. A sa grande déception, car l'Occident n'avait pas besoin d'une Russie forte, mais faible. Pour prévenir une nouvelle menace russe, l'OTAN s'est sans cesse élargie vers l'Est. En même temps, à chaque fois que la Russie tentait de renforcer ses relations avec de nouveaux pays indépendants de l'ex-Union soviétique, comme l'Ukraine et la Géorgie, l'Occident a toujours considéré que Moscou voulait élargir sa sphère d'influence, d'où un endiguement plus resserré et l'expansion de la confrontation. Certains de ces pays ont aussi estimé que le modèle occidental était plus attirant, ce qui n'est pas inexcusable, mais le problème, c'est quand cette « attraction » exacerbe la résistance de ces pays à l'égard de la Russie. Et cela sans faire fi des conséquences pour ces pays qui ont rompu leurs liens avec la Russie. Résultat : dans ces pays qui sont de plus en plus hostiles à la Russie, les droits des Russes locaux ne sont pas efficacement protégés. Dans ce contexte, la Russie est obligée de faire preuve d'inflexibilité pour défendre ses propres intérêts.
La diplomatie dure bénéficie aussi d'un large soutien du peuple russe. Avant que Moscou ne prenne de nouveau le contrôle de la Crimée, ses relations avec l'UE, notamment avec l'Allemagne et la France, étaient assez bonnes, de sorte que le volume des échanges commerciaux augmentait d'année en année. Mais l'annexion de la Crimée à la Russie est allée à l'encontre de l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce que l'UE n'a pu accepter. Elle a pris une part active aux sanctions économiques que Washington a imposées à Moscou. Selon le documentaire « Crimée : Retour à la patrie », c'est après la destitution du président Viktor Ianoukovitch suite à la « Révolution de couleur » que Vladimir Poutine s'est décidé à récupérer la Crimée. A ce moment-là, un grand nombre de Russes s'y étaient déjà rendus pour aider les séparatistes locaux. Après le retour de la Crimée dans le giron russe, la cote de popularité de M. Poutine a connu une augmentation rapide, passant de 63 % lors de son élection à plus de 85 %, voire même à 89,9 % depuis le lancement des raids aériens contre l'Etat islamique. Du fait des sanctions occidentales et de la baisse du cours de pétrole, l'économie russe a subi une croissance négative de 3,8 % en 2015, et les perspectives ne sont guère optimistes pour 2016. La population continue néanmoins de soutenir l'inflexibilité de M. Poutine. En Russie, le patriotisme et le nationalisme représentent un courant dominant, et l'opinion publique et les partis d'opposition se rangent à ses côtés dans ce domaine.
En examinant l'histoire du développement de la nation russe, on peut se rendre compte qu'il est conditionné sur le plan intérieur par les objectifs de sa politique extérieure. Pendant ses deux premiers mandats, M. Poutine a réussi à remettre de l'ordre dans le pays, à renforcer la puissance nationale, à faire augmenter les réserves en devises. Après son retour au Kremlin, il a mis l'accent dans sa politique diplomatique sur l'accroissement de l'influence russe sur les pays de l'ex-Union soviétique et l'établissement de l'Union eurasienne. Bien que Moscou ait payé le prix fort en rivalisant avec l'Occident pour l'Ukraine et en contrôlant de nouveau la Crimée, ces actes qui correspondent aux aspirations du peuple russe à voir leur pays redevenir une grande puissance bénéficient d'un large soutien dans l'ensemble du pays.
Pour autant, il ne faut pas attribuer seulement cette inflexibilité diplomatique de la Russie au style de gouvernance de M. Poutine. Depuis que l'Union soviétique a abandonné sa politique de confrontation, la Guerre froide a pris fin sans une réorganisation de l'ordre mondial , à l'instar d'un conflit militaire. Ne voulant pas se résigner au statut de vaincu, la Russie veut redevenir une grande puissance capable de défendre ses propres intérêts et d'établir son propre agenda. C'est justement pour consolider le statut de la Russie dans le monde et son droit à la parole que M. Poutine adopte une telle attitude inflexible. Il n'a jamais déclaré verbalement qu'il voulait une confrontation avec l'Occident, il souhaite seulement que l'Occident respecte les intérêts russes.
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