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Nouveaux défis et opportunités de l'ICR en Europe |
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HU HONG · 2023-10-09 · Source: La Chine au présent | |
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Ouverture du pont de Pelješac, en Croatie, construit par un groupe chinois, le 28 juillet 2021
L’année 2023 marque le 10e anniversaire de l’initiative « la Ceinture et la Route » (ICR). Basée sur le principe dit « concertation, synergie et partage », cette initiative est un mécanisme efficace pour l’interconnectivité des politiques, des infrastructures, du commerce, de la finance et des échanges humains.
Pour les relations diplomatiques sino-européennes qui se développent depuis plus de 70 ans, l’ICR est devenue une nouvelle plateforme de coopération. Cependant, il est indéniable que les turbulences dans la situation géopolitique mondiale et les politiques durcies de certains pays européens envers la Chine empêchent la pleine libération du potentiel de la coopération sino-européenne dans le cadre de l’ICR et de la connectivité entre l’Asie et l’Europe.
Des résultats fructueux
Les trains de fret Chine-Europe ont marqué un nouveau chapitre dans l’histoire mondiale du transport ferroviaire et ont insufflé un nouvel élan au commerce sino-européen. Le premier train est parti de Chongqing (Chine) pour Duisburg (Allemagne) au mois de mars 2011, et la fréquence des convois s’est accélérée depuis la proposition de l’ICR en 2013. Jusqu’à la fin du premier semestre 2023, plus de 73 000 convois ont circulé sur les lignes de fret Chine-Europe, avec 6,9 millions d’équivalents vingt pieds (EVP) de marchandises au total.
À l’heure actuelle, le réseau de trains de fret Chine-Europe couvre pratiquement l’ensemble du territoire eurasiatique. Sur les six premiers mois de cette année, on a compté 8 641 convois sur les lignes de fret Chine-Europe, avec 936 000 EVP de marchandises, réalisant respectivement une croissance de 16 % et de 30 % par rapport à l’année précédente. Ces dernières années, le commerce le long des lignes de fret Chine-Europe a maintenu une croissance continue et régulière, malgré la pandémie et une demande mondiale en baisse. Premier choix pour le transport logistique international entre la Chine et l’Europe, ces « caravanes d’acier » reliant l’Asie et l’Europe servent de stabilisateur important dans le commerce et la coopération sino-européens.
Il ne s’agit que d’un exemple de réussite de la connectivité entre l’Asie et l’Europe et de la mise en place de l’ICR. Au cours de la dernière décennie, la Chine et l’Europe ont fait de grands progrès dans les « cinq facteurs d’interconnexion », à savoir la coordination politique, l’interconnexion des infrastructures, la facilitation du commerce, l’intégration financière et la compréhension mutuelle des peuples.
Au niveau politique, la Chine a signé des documents de coopération dans le cadre de l’ICR avec 26 pays européens. Des échanges interministériels bilatéraux et multilatéraux concernant les transports, les douanes, le commerce et l’agriculture ont fréquemment été réalisés.
En termes d’infrastructures, le port du Pirée en Grèce et le chemin de fer Hongrie-Serbie sont considérés comme des projets phares de l’ICR en Europe. Le pont de Pelješac en Croatie mis en service en 2022, le plus grand projet d’infrastructure de transport entre la Croatie et la Chine, est le premier projet pour lequel des entreprises chinoises ont remporté un appel d’offres financé par le fonds de l’UE.
Le développement commercial et financier entre la Chine et l’Europe a amplement été bénéficiaire de l’ICR. Entre 2016 et 2021, les importations de la Chine en provenance de l’UE et de l’Europe centrale et orientale ont respectivement augmenté de 63,7 % et de 127,3 %, ce qui a permis d’atténuer les déséquilibres commerciaux persistants entre la Chine et l’Europe. De plus, les institutions financières européennes participent activement à la construction de l’ICR. La Deutsche Bank a publié en 2019 un livre blanc sur cette initiative et la Commerzbank a signé en 2018, avec la Banque industrielle et commerciale de Chine, un protocole d’accord de coopération à cet égard, et a adhéré en 2019 aux Principes d’investissement vert de « la Ceinture et la Route ».
Les échanges humains entre la Chine et l’Europe s’intensifient à travers le tourisme, la coopération entre les universités, les échanges entre les chercheurs et les groupes de réflexion, entre autres. L’Europe est depuis longtemps l’une des destinations préférées des étudiants et des touristes chinois. Après l’assouplissement des mesures de restrictions contre la pandémie, la Chine, la France, l’Italie et l’Espagne ont saisi l’occasion des Années croisées du tourisme culturel, pour stimuler la reprise des échanges artistiques et sportifs bilatéraux. Récemment, des œuvres de maîtres européens, tels que Raphaël, Monet, Van Gogh et Matisse, ont été exposées en Chine, attirant un large public chinois. La Chine a profité des Jeux olympiques d’hiver de Beijing 2022 pour promouvoir la coopération sportive avec la France, qui accueillera les Jeux olympiques d’été 2024, ainsi qu’avec l’Italie, qui accueillera les prochains Jeux olympiques d’hiver.
L’ICR a apporté des avantages tangibles et a permis aux entreprises et aux villes partenaires d’avoir de nombreuses retombées positives. Les trains de fret Chine-Europe traversent plus de 300 villes dans 26 pays. Les villes comme Yiwu (Chine), Lodz (Pologne) et Duisbourg (Allemagne) ont pleinement bénéficié des dividendes apportés par l’initiative, ce qui a contribué à la prospérité de l’économie régionale et à l’augmentation de l’emploi.
Les autres pays en développement partenaires ont également bénéficié de la coopération entre la Chine et l’Europe, et la coopération sur les marchés tiers est devenue un élément important de l’ICR. La Chine a mis en place des mécanismes de coopération sur les marchés tiers avec des pays de l’UE, comme la France, l’Italie, l’Espagne ou encore la Belgique. Dans le cadre de ces mécanismes, les avantages comparatifs des pays développés sont la technologie, l’équipement et l’expérience, tandis que les avantages de la Chine consistent en une capacité de production supérieure. Pour les pays ou régions des marchés tiers, les avantages portent sur leur marché potentiel et leurs besoins de développement. Cela permet de promouvoir une coopération économique et commerciale qui dépasse le niveau bilatéral et crée une situation gagnant-gagnant pour toutes les parties.
Discussion dans la salle d’exposition de l’entreprise française GL Events à la CIFTIS, à Beijing, le 4 septembre 2023 (PHOTO : YU JIE)
Une nouvelle conjoncture
Malgré un bon départ, la coopération sino-européenne dans le cadre de l’ICR et la progression de la connectivité entre l’Asie et l’Europe ont été considérablement entravées par la pandémie de COVID-19 et la crise ukrainienne. Il est donc urgent de retrouver leur élan.
La pandémie et les conflits ont perturbé la sécurité régionale et la stabilité des chaînes d’approvisionnement, et provoqué une intensification des tensions géopolitiques des grandes puissances mondiales. Dans ce contexte, la perception et la confiance mutuelles entre la Chine et l’Europe ont été mises à mal. Certains officiels et universitaires européens ont souligné le déclin de la fiabilité et de la prévisibilité des mesures de la Chine en matière de politique, d’économie et de sécurité, tandis que leurs homologues chinois ont estimé que l’Europe considérait à tort la Chine comme un « concurrent systémique », adoptait une politique non pragmatique à son égard et suivait les États-Unis dans la pression qu’ils exerçaient sur la Chine tout en mettant de côté sa propre autonomie stratégique.
Ces perceptions ont entravé la construction de l’ICR, apportant de nouveaux défis à la coopération sino-européenne et à la connectivité entre l’Asie et l’Europe. L’une des manifestations les plus flagrantes est la stratégie « Global Gateway » lancée par la Commission européenne au mois de décembre 2021. L’UE prévoit ainsi de mobiliser jusqu’à 300 milliards d’euros d’investissements d’ici à 2027 pour construire des infrastructures dans des pays partenaires « partageant les mêmes idées ».
En effet, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a souhaité, à son annonce, qu’elle devienne une « véritable alternative » à l’ICR. Par ailleurs, les récentes déclarations de certains officiels italiens qui envisagent de sortir leur pays de l’ICR mettent en relief la perception négative actuelle qu’en ont les pays européens.
Cependant, l’Europe dans son ensemble joue un rôle de « collaborateur critique » dans l’intention d’optimiser sa participation. C’est aussi une raison importante pour laquelle la Chine et l’Europe ont pu obtenir des résultats fructueux au cours de la première décennie de l’ICR. Mais lorsque les questions liées à l’ICR sont abordées dans une perspective de jeu à somme nulle et de manière manichéenne, le potentiel de cette coopération à hauteur de plusieurs milliers de milliards de yuans est considérablement inhibé.
Heureusement, la Chine et l’Europe s’efforcent toujours d’inverser la situation. Au début du mois d’août, le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi s’est entretenu avec le haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell. M. Borrell a déclaré que la stratégie « Global Gateway » et l’ICR n’étaient pas opposées, mais plutôt complémentaires, et visaient toutes les deux à stimuler le développement mondial. M. Wang Yi s’est dit, quant à lui, impatient de compenser le manque d’échanges entre la Chine et l’UE au cours des trois années de pandémie. Avec la 3e édition du Forum de « la Ceinture et la Route » pour la coopération internationale, qui se tiendra au mois d’octobre à Beijing, et les rencontres multipliées entre dirigeants et officiels, les relations bilatérales et la coopération dans le cadre de l’ICR devraient être remises sur les rails.
La pandémie et la crise ukrainienne ont certes posé des défis à l’ICR, mais aussi apporté de nouvelles opportunités. L’importance de la santé mondiale dans la politique internationale a augmenté, et la création d’une « Route de la Soie sanitaire » est devenue une nouvelle forme de coopération sino-européenne face à l’épidémie. En 2020, la Chine et l’UE ont mis en place deux nouveaux mécanismes de dialogue de haut niveau, l’un sur le développement vert et l’autre sur le numérique, et leur intégration dans le cadre de l’ICR mérite d’être étudiée.
Il est nécessaire que la Chine et l’Europe trouvent des solutions aux problèmes qui sont survenus au cours des dix années d’existence de l’ICR. Si le manque de transparence dans la mise en place de projets, l’incapacité à répondre aux normes européennes et la difficulté pour les entreprises européennes d’accéder aux projets pouvaient être résolus, un nouveau chapitre de la coopération sino-européenne dans le cadre de l’ICR pourrait s’ouvrir.
*HU HONG est chercheur à Pangoal Institution et chargé de recherche au département d'études européennes de l’Institut des études internationales de Chine.
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