L'économiste américaine Fiona Scott Morton a décliné mercredi sa nomination au poste d'économiste en chef à la direction de la Concurrence de la Commission européenne après plusieurs critiques émanant notamment du président français Emmanuel Macron, de cinq commissaires européens et des trois principaux groupes politiques au Parlement européen.

La vice-présidente de la Commission, Margrethe Vestager a tweeté mercredi avoir été informée par Mme Morton de sa décision de ne pas accepter ce poste. "J'accepte cela avec regret et j'espère qu'elle continuera à utiliser ses compétences extraordinaires pour faire pression en faveur d'une application stricte de la concurrence", a-t-elle dit.

La Commission européenne avait confirmé le 14 juillet dernier la nomination de Fiona Scott Morton pour la régulation des géants de la tech à Bruxelles. Une nomination annoncée au moment où l'Union européenne (UE) doit mettre en œuvre de nouvelles législations pour réguler le secteur du numérique, après l'adoption des récents règlements DMA (Digital Markets Act) et DSA (Digital Services Act).

Cette nomination a alors fait polémique puisque le passé de Mme Morton au ministère américain de la Justice et son activité de consultante auprès d'Amazon, Apple et Microsoft ont inquiété plusieurs responsables politiques, notamment français.

Selon des médias français, des membres du gouvernement se sont publiquement étonnés de ce choix. "La régulation du numérique est un enjeu capital pour la France et pour l'Europe. Cette nomination mérite d'être reconsidérée par la Commission", a réagi la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna. Elle a appelé Mme Vestager à reconsidérer la nomination de l'Américaine à un poste clé de la Commission européenne, ce qui a alors été rejeté par l'exécutif européen.

Cinq commissaires européens -l'Espagnol Josep Borrell, le Français Thierry Breton, la Portugaise Elisa Ferreira, l'Italien Paolo Gentiloni et le Luxembourgeois Nicolas Schmit- ont écrit à la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, pour réclamer une réévaluation de cette nomination, a rapporté mardi soir l'AFP. Par ailleurs, les trois principaux groupes au Parlement européen (PPE, S&D et Renew) avaient aussi demandé le 14 juillet dernier à reconsidérer cette nomination.

"Si nous n'avons aucun chercheur (européen) de ce niveau pour être recruté par la Commission, ça veut dire que nous avons un très grand problème avec tous les systèmes académiques européens", avait estimé M. Macron mardi. Selon lui, "les Européens ont besoin de développer des compétences européennes, d'avoir une autonomie stratégique". Il doivent "avoir une autonomie de pensée" et le recrutement de Mme Morton "n'est pas forcément la décision la plus cohérente à cet égard".

Le président français a noté que l'experte américaine avait travaillé auprès de beaucoup d'entreprises de la tech américaines, jugeant difficile d'imaginer comment une ancienne consultante pour des entreprises telles qu'Amazon, Apple ou Microsoft pourrait aider la Commission européenne à prendre des décisions fortes contre ces mêmes entreprises.