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Les réparateurs du passé au Sichuan

WANG XI  ·  2023-12-11  ·   Source: La Chine au présent
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Un relieur d’art restaure un ouvrage ancien. 

Le patrimoine culturel matérialise la perpétuation de la civilisation humaine. À son chevet, les restaurateurs d’art, silencieux, prodiguent leurs soins, un savoir-faire poli par le temps et nourri par une fierté solennelle. Dans la province chinoise du Sichuan, réputée pour sa riche collection d’ouvrages anciens, la dextérité de ces réparateurs du passé est d’autant plus importante pour les manuscrits d’antan et les sagesses ancestrales qui doivent être conservés pour les générations futures.

Un regard clinique

Alors que la lecture sur écran est de mise de nos jours, le plaisir que procurent le bruissement et le toucher d’un livre en papier ne nous est presque plus familier. Dans le Musée de la Chaumière de Du Fu, Song Xin, relieur d’art, présente une collection de 16 spécimens de papier de livres anciens. Ces feuillets se diffèrent les uns des autres par leur époque, matériaux et techniques de fabrication, laissant transparaître un charme unique, quasi intact à travers des siècles de vicissitudes. Selon M. Song, depuis l’invention du papier en Chine, le livre a connu plusieurs présentations : livre en rouleau, reliure en accordéon, reliure en papillon, livre au dos enveloppé ou encore livre non rogné. Et la reliure brochée à fil, qui est la plus connue, n’est apparue que sous la dynastie des Ming (1368-1644).

C’est justement sur une connaissance approfondie des reliures, des matériaux et des éditions que repose l’expertise des restaurateurs de livres anciens. Dans ce milieu professionnel en Chine, on entend par « livres anciens » principalement les manuscrits ou imprimés antérieurs à 1912 avec une reliure classique. Ces restaurateurs de papier s’occupent également des œuvres de calligraphie, de peinture et de lithographie. M. Song compare son travail au traitement de maladies, qui passe par un diagnostic avant de faire une prescription en fonction de celui-ci. Lors d’une opération de réparation, toute méthode doit respecter l’original, se limiter à une intervention minimale et assurer la réversibilité. L’activité laisse peu de place à la créativité, le choix du papier devant s’approcher le plus possible de celui du livre à restituer, en termes de couleur, d’épaisseur et de texture.

Dans le Centre de restauration des livres anciens de la Bibliothèque provinciale du Sichuan, l’historique des interventions de Wu Shiyu en 2021 sur un ouvrage de médecine traditionnelle chinoise de l’époque des Qing (1616-1912) révèle plus de détails. Il contient 19 catégories d’informations générales sur le livre réparé, dont le type de document, le format et la structure. Il y est noté 16 types de dégâts et d’altérations que le livre a subis à différents endroits : acidification, déchirure, fragilisation, souillure, trou, moisissure, dommage dû aux excréments d’insectes, entre autres. En tête d’un compte rendu de restauration qui y est fourni, les méthodes et les matériaux utilisés sont spécifiés.

 

Des instruments utilisés pour la restauration de livres anciens dans la salle d’exposition sur la restauration de livres anciens de la Chaumière de Du Fu (PHOTO : MI YAN) 

Une application de fourmi

Chaque jour, en blouses blanches comme des médecins, M. Song et Mme Wu réparent des feuilles de papier extrêmement fines, avec une délicatesse et une précision chirurgicales. Chaque geste étant décisif pour le suivant, la concentration est toujours de rigueur.

Si vous n’assistez pas à une opération de restauration, vous ne pouvez pas vous imaginer qu’un livre peut être lavé à l’eau. « Le but du lavage à l’eau est d’éliminer les grosses saletés et de désacidifier les feuillets pour retarder le vieillissement du livre. En fait, bon nombre de livres anciens sont d’une fabrication impeccable, avec une technique d’impression idoine et des matériaux de qualité. Le papier ne se décolore pas et l’encre ne s’estompe pas au fil des ans, ils ont fusionné depuis longtemps. Les feuillets sont donc loin d’être aussi fragiles qu’on ne le pense », explique Mme Wu.

Pour les profanes, la restauration livresque peut sembler fastidieuse. Le travail commence toujours par l’examen des blancs de tête, de pied et de couture d’une page. Pour réparer un trou, il faut d’abord mettre de la colle sur son périmètre avec un pinceau, puis y appliquer un morceau de papier de raccommodage, qui doit correspondre autant que possible à la texture et à la couleur de l’original, et passer quelques coups de brosse dessus pour consolider l’adhésion. Enfin, il faut prendre des pincettes pour déchiqueter les rebords du rapiéçage jusqu’à ce qu’il s’harmonise avec les rebords du trou.

M. Song et Mme Wu répètent encore et encore ces étapes, passant d’une déchirure à une autre, la tête baissée, les yeux rivés sur les dégâts et les doigts prisonniers de quelques centimètres carrés qui se déplacent à l’allure de fourmi. Mme Wu soulève et scrute un feuillet réparé sous la lumière de la lampe : des contours grands ou petits, réguliers ou irréguliers, affleurent par-ci, par-là, ce sont les tracés de sa dextérité.

Le Sichuan possède une grande réserve de livres anciens. Selon un inventaire de 2021, le Musée de la Chaumière de Du Fu abritait plus de 24 000 volumes de livres et documents anciens, dont 6 789 provenaient de 829 ouvrages rares ; la Bibliothèque provinciale du Sichuan en conservait environ 650 000 volumes, dont 60 000 provenaient de 5 000 ouvrages rares. Ces chiffres donnent un aperçu de l’ampleur des travaux de restauration.

 

Dans la Chaumière de Du Fu, les visiteurs peuvent observer le travail des restaurateurs à travers des baies vitrées. (PHOTO : MI YAN) 

Un pèlerinage arachnéen

Dans le Musée du Sichuan, au calme de son centre de restauration des objets anciens, de nombreuses peintures anciennes ressuscitent. Une fois entré, on pourrait être frappé d’étonnement par deux pans de mur zébrés de traces, qui se révèlent être des résidus de ruban adhésif. La restauratrice d’art Zou Ruoran explique qu’une peinture, une fois réparée, doit être collée et étendue sur le mur pour sécher, une étape appelée « étendage mural ». Ce mur est recouvert de 25 couches de papier coréen, le hanji, une matière durable qui ne moisit pas et est adaptée à la peinture ancienne. « Après l’étendage mural, quand on décolle la peinture, les rubans adhésifs laissent naturellement des traces », ajoute-t-elle. En effet, ce sont des marques de la résurrection de peintures anciennes depuis l’ouverture de cet atelier il y a près de deux ans.

Les types de dégâts subis par les peintures anciennes sont similaires à ceux qui concernent les livres, et il en va de même pour les étapes de restauration et les principes à observer. La restauration picturale exige, en plus, la restitution des couleurs et la réparation des matériaux de support. Ce n’est pas facile de décoller la peinture de sa toile de montage, on a affaire à une tâche méticuleuse, qui demande des mains arachnéennes pour déshabiller cette feuille de papier d’une finesse et fragilité des ailes de cigale. Un pèlerinage digital qui prend souvent plusieurs heures.

Diplômée en restauration d’art à l’université, Mlle Zou fait carrière depuis six ans. Elle a déjà restauré certaines œuvres plus grandes qu’elle, et d’autres déchiquetées en lambeaux. « La restauration d’art est un processus de perfection continue », lorsqu’un maître restaurateur lui signale des problèmes, elle redouble d’efforts sans rechigner. « Mon apprentissage a vraisemblablement commencé à mon arrivée à l’atelier. Il m’a fallu deux mois pour acquérir ne serait-ce qu’une seule compétence de base, celle de brosser le papier jusqu’à ce qu’il n’y ait aucun pli. » Une fois les techniques maîtrisées, encore faut-il rester concentré et scrupuleux sur chaque démarche d’un cheminement qui se réitère jour après jour, année sur année. « Si j’ai choisi cette carrière, c’est pour y consacrer toute une vie. Donner une seconde jeunesse au patrimoine culturel, ça a beaucoup de sens », enchérit-elle.

Mme Wu, engagée dans ce métier depuis près de onze ans, partage aussi ce sens des responsabilités : « La restauration des livres anciens contribue à préserver des documents historiques précieux, et à transmettre et promouvoir le patrimoine culturel, afin que les générations futures puissent apprendre les connaissances et la culture du passé. » Un jour, elle réparait un ouvrage de médecine traditionnelle chinoise, lorsqu’elle a découvert une ordonnance de breuvage qu’elle a trouvée fabuleuse. Après une recherche sur Internet, elle a appris avec joie que ce breuvage se prescrit encore aujourd’hui : « En fait, ces bonnes choses que nos aïeux nous ont laissées se transmettent doucement et en filigrane ! »  

 

WANG XI est journaliste à Chengdu Culture. 

 

 

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