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Dualité et résilience |
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Florence Valenduc · 2021-07-20 · Source: Chinafrique | |
Mots-clés: Sichuan; GYLD China Tour |
À la découverte de la province du Sichuan, troisième destination du programme GYLD China Tour.
Un groupe de 21 jeunes expatriés internationaux et de Chinois issus de divers horizons professionnels se sont retrouvés au cœur de la Chine du sud-ouest début juin. L’objectif de ce voyage était d’explorer cette terre pleine de contrastes représentative de la Chine telle qu’elle est réellement.
Entre traditions et modernité
Douceur de vivre sans égale qui fait la réputation de la province du Sichuan.
La Chine fait le lien entre le passé, le présent et l’avenir car la culture ancienne et la modernité y sont étroitement liées du fait de sa longue histoire et de la croissance économique rapide.
Le Sichuan ne fait pas exception à la règle. Chengdu, chef-lieu de la province, est une ville moderne desservie par un aéroport international, symbole d’ouverture sur le monde, et hébergeant des institutions de coopération internationale telles que le Business and Innovation Center for China-Europe Cooperation (CCEC) implanté dans un bâtiment à l’architecture originale et futuriste. Bien qu’enclavé, le Sichuan a toujours entretenu des liens politiques et économiques avec ses voisins d’Asie du Sud-Est mais aussi avec l’Europe et le reste du monde. Autre exemple d’infrastructure moderne : le Centre de recherche sur le Panda géant de Chengdu (Research Base of Giant Panda Breeding), organisme à but non lucratif consacré à l’étude et la reproduction en captivité de ce mammifère.
Tel un symbole, l’animal résume parfaitement la mentalité singulière des Sichuanais : émouvant et touchant, partisan du savoir-vivre sachant profiter de la vie, bon vivant, mais aussi très indépendant, secret et possédant un caractère bien trempé. Son image imprimée un peu partout illustre le véritable culte qu’on lui porte.
« Chengdu possède toutes les qualités des métropoles chinoises mais la ville vit à un rythme beaucoup plus lent au quotidien. Ses habitants aiment s’installer en terrasse pour manger et boire jusque tard dans la nuit. Même la variété des spécialités culinaires montrent l’importance que revêt la qualité de vie », a indiqué Kuang Kai, 33 ans, professeur à l’Université Tsinghua de Beijing, à CHINAFRIQUE au retour du voyage.
La spécialité gastronomique la plus représentative de la convivialité sichuanaise est évidemment la fondue (huoguo en chinois). Ce plat permet de se réunir autour d’une table avec au centre le caquelon contenant le fameux bouillon aux piments rouges dans lequel chacun plonge des mets divers et variés. Cette configuration de repas invite aux longues discussions et franches rigolades régulièrement interrompues par des toasts portés à la volée. La boisson festive la plus populaire en Chine est le baijiu, alcool distillé à base de céréales et de riz. Ce breuvage accompagne toutes les célébrations. Pas étonnant que Wuliangye, premier producteur de boissons alcoolisées de Chine dont la marque est l’un des emblèmes du pays, aient ses origines à Yibin, dans le sud-est du Sichuan. Environ 10,8 milliards de litres sont consommés chaque année dans le monde, essentiellement en Chine, selon une étude de l’International Wine and Spirit Research (IWSR).
Sur le plan culturel, Chengdu est également le centre de l’opéra traditionnel du Sichuan, qui regroupe des cracheurs de feu et des performances impressionnantes de changement de masques (bian lian) dignes de tours de passe-passe. « La ville la plus cool de Chine », selon les témoignages d’expatriés vivant ou ayant vécu à Chengdu, tient plus que tout à préserver son authenticité et sa chaleureuse réputation.
Harmonie entre l’homme et la nature
Système d’irrigation de Dujiangyan, conçu au IIIe siècle av. J-C et toujours en activité.
Le ciel est gris, lourd et menaçant. Le ton est donné. Dépaysement garanti dans cette mystérieuse province où l’oxygène humide et odorant enveloppe ses montagnes vertes et embrumées. L’omniprésence de la nature met en évidence les défis auxquels les civilisations qui se sont succédé au fil des siècles ont dû faire face.
Des problèmes d’irrigation notamment, qui ont si souvent plongé la Chine dans les affres d’inondations meurtrières. Il y a plus de 2 000 ans, des constructeurs ont mis au point le système d’irrigation de Dujiangyan, exploit en matière d’ingénierie écologique qui continue de réguler les eaux de la rivière Minjiang et de les distribuer sur les terres fertiles des plaines de Chengdu. Paysage époustouflant surplombant la rivière, le mont Qingcheng est le berceau du taoïsme chinois fondé par le philosophe Zhang Daoling et célébré par des temples anciens parfaitement conservés. Cette doctrine défend l’idée que l’homme peut atteindre l’harmonie entre le corps et l’esprit, et réaliser ainsi un lien essentiel avec le dao (la voie) et le cosmos. Inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2000, le site regroupant le projet de Dujiangyan et le mont Qingcheng fait actuellement figure d’exemple en matière d’écologie avec son projet de neutralité carbone, témoignant de la volonté de la Chine de continuer son développement tout en maintenant l’harmonie entre l’homme et la nature en favorisant les ressources naturelles et durables.
La visite du site archéologique Sanxingdui à Guanghan est quant à elle la preuve que des découvertes peuvent remettre en question les origines culturelles. Ces reliques n’en finissent pas d’étonner les archéologues : le style ne s’apparente aucunement à l’art chinois de la même période. Les objets en bronze démontrent une technique avancée pour l’époque (2800-800 av. J-C). « Le plus impressionnant, c’est l’aspect des sculptures et la représentation de leurs regards tournés vers l’avenir avec des yeux en forme de télescopes », s’émerveille Mehad Mosua, 26 ans, doctorante égyptienne de l’Université du Nord-Ouest de Chine. Les fouilles ont permis de mettre au jour de précieux vestiges historiques donnant une idée du mode de vie sophistiqué d’alors.
Parfois, la nature prend le dessus sur l’homme, impuissant face aux catastrophes naturelles de grande ampleur. Le 12 mai 2008, c’était comme si le ciel était tombé sur la tête des habitants de Yingxiu, dans le district de Wenchuan. Le séisme meurtrier a dévasté la zone de l’épicentre dont l’école primaire Xuankou et a été ressenti jusqu’à Shanghai et Beijing. Sur le site transformé en mémorial, l’établissement scolaire a été conservé tel quel comme témoin des conséquences d’une telle catastrophe sur des constructions humaines en complément du musée qui relate fidèlement les faits. « J’ai réalisé que les tremblements de terre ne connaissent ni race, ni sexe, ni âge. Ce genre de situations met en évidence le fait que l’humanité a indubitablement un avenir commun », confie avec émotion Li Xiaohua, 38 ans, journaliste pékinoise. Le bourg, entièrement reconstruit à deux pas de là, ne laisse rien entrevoir de ce lourd passé et ses habitants accueillants donnent une belle leçon de résilience et d’espoir, tout comme la plantation de thé de Jiang Weiming, qui a reçu le groupe pour une dégustation de sa production de thés très parfumés, le 6 juin.
Le périple s’est achevé à Shunan Zhuhai, forêt de bambous préservée qui a hébergé le tournage de Tigre et Dragon (2000) d’Ang Lee, Oscar du meilleur film étranger. Trésor de verdure caché et véritable bouffée d’oxygène, le lieu donne l’impression de flotter dans un petit paradis. La gastronomie locale propose toute une gamme de plats conçus à base de bambous, et qui ne pouvait pas avoir d’autre nom que « la cuisine des pandas » !