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Un nouveau mode de vie |
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LI YAQI* · 2024-10-31 · Source: La Chine au présent | |
Mots-clés: |
Gym baduanjin au sortir du lit, massage avant le coucher, musicothérapie, calligraphie, méditation... ces pratiques traditionnelles pour s’entretenir intéressent de plus en plus de jeunes Chinois. La peau, l’humeur, le sommeil, le poids et la vue les préoccupent tout particulièrement, selon le Rapport d’analyse prospective de la santé des Chinois 2023 du site d’informations médicales Dxy.cn.
Une gym en regain de popularité
Dans les parcs ou sur les places de quartier à Chengdu, il n’est pas rare de croiser des personnes pratiquant la gym baduanjin, littéralement « Huit pièces de brocart » en référence à ses huit mouvements. De nombreux jeunes optent pour des cours payants afin de s’exercer avec rigueur.
Wang Mingshan, jeune héritier du taijiquan, enseigne les baduanjin. Il donne ses cours à une dizaine de jeunes sous les ombrages et au son des chants d’oiseaux, constatant un intérêt grandissant pour ces exercices chez les nouvelles générations de Chengdu. « Il y a quelques années, 30 % de mes élèves étaient des jeunes, l’année dernière, 50 %. La part s’est élevée à 80 % cette année. Ils ont 28 ans en moyenne. » Les cours gratuits affichent complet dès l’ouverture, ceux qui sont payants voient aussi les inscriptions affluer.
Les baduanjin sont gracieux et caractéristiques du charme oriental. Leur popularité à Chengdu attire même des touristes désireux de vivre l’expérience des séances collectives avec une centaine de participants. Chen Shumei, une Malaisienne proche de la trentaine, s’était initiée avec sa mère aux baduanjin il y a environ deux ans. Elles trouvent que cette gym traditionnelle chinoise élégante et douce, très bénéfique pour le bien-être physique et mental. Après avoir commencé avec des vidéos sur Internet, elles ont rencontré des difficultés à rectifier les gestes, d’où leur venue à Chengdu en mai dernier, à la fois pour le tourisme et l’apprentissage.
Chen Shumei et sa mère se sont rendues sur la place du centre de recherche de l’Université de médecine traditionnelle chinoise de Chengdu, ayant appris que des cours ouverts à tous y étaient donnés par des professionnels tous les matins. Pendant que sa mère suivait les mouvements du professeur, Chen Shumei filmait tous les gestes clés et les explications pour s’en servir lors de leurs entraînements ultérieurs. Pendant les pauses, elle a également fait connaissance de plusieurs amateurs venus du Yunnan.
De nos jours, les baduanjin sont considérés comme une forme de fitness léger imprégnée de philosophie et d’esthétique orientales. Traditionnellement, cet art imposait plus d’exigences et de contraintes. Mais les temps changent. Comme l’a très bien dit Wang Mingshan, « quiconque veut le pratiquer n’a pas à se soucier du lieu, du temps et des circonstances, puisque c’est un mode de vie ».
Un dispensaire de médecine traditionnelle chinoise propose des boissons saines et diététiques. (PHOTOS : HAN JIE)
Un régime diététique
« Il faut bien manger, même tout seul. » Cette devise des jeunes est parlante quant à l’évolution de leur vision de l’alimentation. Aujourd’hui, il est de rigueur de bien manger pour bien vivre. Shasha, une Chengdunaise d’une vingtaine d’années qui travaille dans le tourisme, est une férue de diététique.
« Les légumes de saison avec plein de couleurs donnent un grand sentiment de bonheur. C’est à la fois beau et sain. » Après le repas, elle a l’habitude de se faire une tasse de thé avec deux gâteaux à faible teneur en sucre. Les jeunes comme Shasha sont nombreux à Chengdu, les groupes et les communautés d’adeptes de la diététique traditionnelle ou de fins gourmets pullulent sur Internet.
Fuchsia Dunlop, spécialiste britannique de la cuisine comparée, étudie et vit depuis plusieurs années à Chengdu. Elle observe que la fonction thérapeutique du restaurant s’affaiblit en Europe et aux États-Unis, mais gagne en vigueur en Chine. « Si vous le souhaitez, vous pouvez trouver des restaurants qui proposent des cuisines médicinales, ou encore suivre votre régime diététique n’importe où. »
Pour elle, la cuisine chinoise recherche l’harmonie, tandis que la cuisine occidentale privilégie la logique. La gastronomie chinoise fusionne diversité, compétences exquises et joie de vivre avec les principes d’autodiscipline, de santé et d’équilibre. Fuchsia Dunlop a récemment organisé une séance de dédicace pour son livre Invitation to a Banquet à Chengdu, suscitant un grand engouement chez les jeunes. Sa perspective interculturelle permet sans aucun doute de prendre du recul sur l’alimentation traditionnelle.
Une quête quotidienne du bien-être
Li Juan, qui travaille dans le BTP, fait souvent des heures supplémentaires. Cependant, elle prend toujours soin de se récompenser, par exemple avec une tasse de tisane. Sur son bureau, elle garde des chrysanthèmes, du chèvrefeuille, des roses ou des écorces de mandarine. Sous son influence, les jeunes du bureau s’enrôlent aussi dans l’armée des adeptes du bien-être.
À Chengdu, la quête du bien-être des jeunes a donné naissance à un grand nombre de boutiques de café herbacé, de salons de tisanes diététiques, de boulangeries diététiques et de salons du bien-être. Les statistiques montrent que ces dernières années, la taille du marché des snacks et des boissons santé de Chengdu a augmenté d’année en année, et que les compléments alimentaires traditionnels connaissent un regain de vitalité. Le thé au lait à la gélatine d’âne et le sirop de prune médicinal sont sortis du lot et devenus de nouvelles boissons vedettes. Le café herbacé associé avec du dendrobium, du ginseng, de la cannelle, des fruits de moine, de la feuille de lotus et de l’aubépine est également très prisé. Le lait de soja aux céréales fraîchement moulu est particulièrement populaire.
L’essence du bien-être réside non seulement dans l’entretien du corps, mais aussi dans la prévention des maladies. La jeune designer Xu Ting aime beaucoup les massages. Lorsqu’elle sent son corps éreinté, elle se rend dans un salon de massage ou au département de réadaptation de l’hôpital pour laisser le physiothérapeute soulager ses épaules, sa nuque et ses muscles lombaires endoloris. « Ces deux dernières années, je me suis prise de fascination pour le massage chinois. On sent le parfum médicinal dès qu’on entre, et l’environnement est zen et relaxant. »
Si le massage chinois apporte une détente à la fois physique et mentale, la thérapie par la musique traditionnelle est un massage spirituel pour prévenir l’anxiété. Ces dernières années, de nombreux jeunes ont commencé à se soigner par la musique traditionnelle. La musique jouée par des instruments traditionnels tels que le guqin, le xiao, le taoxun et la flûte en bambou accompagne les jeunes dans leurs moments de méditation, de lecture, de sport, et de sommeil.
Qu’il s’agisse de nourritures, de sports ou de loisirs, les jeunes ne lésinent pas sur les dépenses de santé. Selon le Rapport d’enquête 2022 sur la vision de la santé des jeunes citadins en Chine, la consommation de biens et de services de santé ainsi que cette volonté de consommer s’accroissent avec l’âge. Au moins une expérience de cette consommation se fait constater chez 78,5 % des 18 à 19 ans et 95,7 % des 30 à 39 ans, cette dernière tranche d’âges étant également le fer de lance de la consommation de moyenne et haute gamme. En 2016, il n’y avait que quelques centaines de salons de massage à Chengdu, mais aujourd’hui, plus de 10 000, et la proportion de jeunes consommateurs de 20 à 35 ans peut atteindre plus de 70 %. Avec une clientèle jeune accrue, les services sont mis à niveau : le massage accompagné du karaoké, de films 4K et de dégustation gastronomique est devenu chose courante.
À Chengdu, les soins de santé sophistiqués, pratiques et efficaces font l’objet d’innovations constantes. Suivant la culture traditionnelle et éveillant les gènes culturels, la transformation de la perspective de santé et du mode de vie des jeunes devient un paysage nouveau des villes modernes.
*LI YAQI est journaliste à Chengdu Culture.
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